Dernier bilan…

Et voilà, c’est fini… Ca fait presque 3 semaines que je suis rentrée… Je tenais à écrire un dernier article de bilan, pour moi-même mais aussi pour quelques-uns de mes lecteurs (ou lectrices, n’est-ce pas les filles ?!) qui se demandent peut-être quel est mon ressenti après tout ça… Déjà, il faut que je vous explique pourquoi je ne l’ai pas écrit plus tôt, cet article, et pourquoi je n’ai pas non plus mis de photos en ligne comme je vous l’avais promis… La raison est simple : je n’y arrive pas ! Je n’arrive pas à en parler en détails ni à y penser sans avoir les larmes aux yeux et la gorge qui se serre… Je n’ai pas encore réussi à regarder ne serait-ce que quelques photos… Alors jusque là, j’utilise la technique (non validée par mon hémisphère gauche) de l’autruche : je me contente de refouler ces émotions au fin fond de moi-même et je gère au quotidien mes petits problèmes d’occidentale : m’installer dans mon nouvel appart, faire des achats, organiser des rendez-vous à gauche à droite avec les administrations et voir tous mes amis et ma famille. Et ça m’occupe à temps plein croyez-moi… Enfin je m’arrange pour être occupée à temps plein plutôt, histoire de ne pas avoir à affronter cette réalité, au fond, qui m’angoisse… Alors pour ne pas sombrer dans la déprime, je vais me contenter de reprendre mes trois bilans habituels :

-          Bilan relationnel tout d’abord : bon ben comme vous l’aurez compris, ils me manquent terriblement… Par « ils », j’entends les enfants bien-sûr. Avec qui j’ai essayé de prendre de la distance lors de ma dernière semaine là-bas, mais venant de passer plusieurs mois ensemble, 24h/24, 7j/7, comment aurais-je pu efficacement prendre de la distance ?! J’ai « délégué » aux espagnoles les petites habitudes du matin et notamment le schmirrage de crème avant de partir à l’école, mais bon, c’est toujours vers moi que venaient les « blessés » : un pansement par-ci, un nettoyage de plaie par-là… sachant pertinemment que le jour où les espagnoles partiraient elles aussi, plus personne ne s’occuperait de ça… Les adultes népalais n’ont jamais eu l’habitude de nettoyer leurs propres plaies, comment pourraient-ils en prendre l’habitude pour les enfants… ?

Au moment où j’écris cet article, je me demande comment va chacun d’eux, je sais qu’il y a une nouvelle bénévole française, très gentille d’après Krishna, tant mieux. Pour autant, j’aimerai plus de détails : Deepak arrive-t-il à faire tout seul ses divisions ? Purna s’est-il encore fait pincer par le chien ? Niraj a-t-il bien nettoyé ses oreilles ? Mithu arrive-t-elle à comprendre ses énoncés ? Et bien d’autres questions encore que je me pose au quotidien et que je n’ai pas encore posé à Krishna parce que je sais pertinemment sa réponse : « here everything is allright, don’t worry ».  Non mais moi je veux des détails ! Même si ce sont des détails qui n’intéressent personne, ils m’intéressent moi ! J’ai encore envie de savoir au jour le jour leurs difficultés, leurs progrès, leurs petits bobos… Je ne suis pas encore sevrée d’eux, ça, c’est sûr… Je vais écrire à chacun je pense, une vraie lettre, écrite à la main, personnalisée, avec toutes les petits choses qu’on a partagé quand j’étais avec eux… Qu’ils sachent que je ne les ai pas oubliés et que je pense à eux chaque jour… Plus j’y pense et plus ils me manquent en fait, la technique de l’autruche finalement c’était pas si mal…

 

-          Bilan matériel ensuite : pendant les dernières semaines avant mon départ j’ai acheté à peu près tout ce que je pouvais pour assurer leur « survie » pour les prochains mois. Avec l’aide de vos derniers dons, j’ai pu faire : les grosses courses pour au moins 1 mois, acheter plein de fournitures scolaires, remplir les jerricans de kérosène, payer un mois de loyer d’avance, rhabiller tout le monde en fonction des besoins (des chaussures pour les uns, des tee-shirts pour les autres…). Bref, j’ai cassé la tirelire de mes dernières roupies. Sur ce plan-là, je suis satisfaite, il n’y a pas eu de gaspillage. Ils devraient avoir de quoi tenir un bon mois, en attendant d’avoir d’autres bénévoles qui les aident. Je sais pertinemment cependant que l’aide de quelques bénévoles de passage ne suffira pas, et comme me l’a dit Laxmi avant mon départ, jusqu’ici aucun bénévole ne les avait aidé autant, financièrement parlant. Je le sais bien, c’est bien pour ça que j’avais décidé d’imprimer les calendriers l’an dernier… Pour autant je n’ai pas eu la sensation d’être une « vache à lait » pour eux… Bien-sûr au final j’ai dépensé une somme substantielle, mais comparée aux dépenses que j’aurai eu en France sur la même durée, ça me semble juste tout à fait normal. Et c’est vraiment hallucinant de se dire qu’on peut faire vivre une famille de 15 personnes au Népal avec un demi-salaire français… et quelques dons bien-sûr, merci les amis ;)  Et puis même, financièrement, ça s’est plutôt bien passé pour moi, parce qu’en revenant en France, je suis tout à fait capable de faire face à mes charges de logement, de transport etc… Bon, j’ai des réflexes d’économies qui ne vont pas me lâcher de sitôt, mais ça, ça devrait m’aider en attendant de retrouver mon salaire à 100% :) Et puis la deuxième raison pour laquelle je ne regrette rien, c’est que toutes les dépenses que j’ai fait ont été des dépenses nécessaires et indispensables. Au moins, pendant ces 5 mois, Krishna et Laxmi n’ont pas eu à quémander à leurs amis et à leurs familles pour survivre. Krishna, lui, a l’air de gérer ce stress des dépenses du quotidien avec beaucoup de philosophie (comme je vous l’avais déjà dit), mais Laxmi, elle, elle stresse en permanence, en voilà une qui ne va pas faire de vieux os, ça, c’est sûr… Alors pour continuer à les aider efficacement depuis la France, et parce que je leur ai promis à tous que j’allais continuer à veiller sur eux, même de loin, j’ai l’intention d’ouvrir une asso qui me permette de récolter un peu d’argent pour eux (ne serait-ce que pour payer le loyer) et dès qu’elle sera créée, je vous tiendrai au courant, si vous voulez m’aider à les aider… D’ailleurs si vous avez déjà des conseils ou des idées, je suis preneuse, et au grand jeu-concours intitulé « Recherche du nom de l’asso », je vous annonce que le prix sera… ma gratitude éternelle !?! (Et si ça pouvait être un jeu de mots contenant le mot Népal et l’aide aux enfants, ça serait top, merci ;) )

 

-          Bilan psychologique enfin : Heuuu, ben, ça dépend des jours… Parfois je sombre dans la tristesse la plus profonde à l’idée de les avoir laissés, tout en me disant que de toute façon je ne pouvais pas rester là-bas indéfiniment… Parfois je me dis que je suis contente d’être rentrée, parce que j’aime aussi ma vie ici, j’ai retrouvé ma famille, mes amis, la Moselle et Nancy, j’ai tout ce qu’il faut pour être heureuse ! Sauf que j’ai la sensation d’avoir laissé mon ventricule droit à l’autre bout du monde…

J’ai du mal aussi à répondre aux questions des gens qui me revoient pour la première fois : « Alors c’était comment le Népal ? » ben, comment dire, c’est difficile à résumer 5 mois, là, comme ça… Et puis de toute façon, j’arrive pas vraiment à en parler, je parle des différences culturelles, mais jamais jamais je n’arrive à parler des enfants. La rupture a juste été trop brutale le jour où je les ai quittés… Oh j’ai des nouvelles, bien-sûr, mais ça n’a rien à voir avec l’intensité de ce qu’on a vécu ensemble… Vous ajoutez à ça le changement de rythme de vie, de culture et d’occupation au quotidien, et vous pourrez peut-être comprendre pourquoi j’ai du mal à en parler… Mais je n’ai pas l’intention de m’en plaindre, je le savais avant de partir, c’est un simple constat, amer et déprimant, avec lequel je vais devoir composer dans les mois à venir. Et puis entre nous, si je n’étais pas revenue dans cet état là, c’est qu’en réalité cette expérience ne m’aurait pas apporté tout ce que j’en attendais, et finalement la déprime qui me guette ici n’est que le pâle antagonisme du bonheur que j’ai éprouvé là-bas…

 

Pour conclure, je rajouterai enfin que cette expérience m’a permis de découvrir des choses sur moi-même, la plus importante étant le fait que je me sente tout à fait capable à présent d’élever une famille nombreuse. Cela dit, je ne suis pas sûre d’en avoir tout à fait envie, d’élever une famille nombreuse^^ parce que les enfants, ça vous bouffe vraiment tout votre temps :) Mais pour y avoir participé là- bas, dans cet orphelinat, je peux vous assurer que ça justifie pleinement tous les efforts financiers, matériels et organisationnels que j’ai pu consentir avant mon départ. Je ne regrette pour rien au monde d’y être allée et j’y retournerai, encore et encore. Et à la question que beaucoup d’entre vous me posent : «  Et c’est quand que tu y retournes ? ». La réponse émotionnelle est «demain », la réponse pragmatique est « je ne sais pas encore, mais j’ai comme projet d’y retourner d’ici 2 ans je pense… ». Et pour vous faire cette réponse j’essaie de mettre en veilleuse cette autre phrase de Rubina que j’ai lue à l’aéroport et qui a achevé de déchirer ce qu’il restait de mon coeur : « And please come back, as soon as possible »…

 

Retour en Moselle…

Et me voilà de retour… 5 mois plus tard…

Le contraste culturel est tellement saisissant au retour que vous avez vraiment l’impression d’avoir rêvé d’être partie.. Vous êtes sur la même Terre mais vous ne vivez plus dans le même monde. Est-il vraiment possible qu’il y a encore 48h vous viviez dans des conditions si différentes ?! La couleur de peau, la langue, et même le sens de circulation ne sont plus les mêmes !

Vous retrouvez bien-sûr avec plaisir les amis, la famille et tout le confort moderne : une douche thermostatée, l’électricité 24h/24, l’eau potable au robinet, une machine à laver, une chasse d’eau qui fonctionne et j’en passe… Vous retrouvez la propreté d’une maison bien entretenue, la cuisine française et les spécialités locales (du saucisson maison et une part de tarte à la rhubarbe !!). Vous retrouvez les sensations, les odeurs, les couleurs. Et vous vous dites que, quand même, la Moselle est vraiment belle.

Vous êtes complètement déphasée aussi, la luminosité tard le soir vous étonne, et vous n’avez aucune idée de l’heure qu’il peut être en regardant le soleil… Vous dormez n’importe quand, mais vous avez réussi à faire le tour du cadran la nuit dernière et ça, c’est cool, vous avez du sommeil à rattraper !

Et puis dans toutes ces retrouvailles, vous avez constamment des flashs de souvenirs, des sourires et des rires d’enfants, et le réflexe d’économiser l’eau et l’électricité à tout instant… Et puis le tintement de vos bracelets vous ramène à chaque mouvement là où vous étiez il y a encore quelques jours… Vous repensez aux mots que Rubina vous a écrit, des mots qui touchent par dessus tous les autres, et qui ont déclenché la plus grosse crise de larme de votre vie dans la salle d’embarquement d’un autre pays, d’un autre continent, d’un autre monde… :

« I will miss you in my every step »

And so do I…

Avant-dernier bilan…

Eh oui, c’est déjà l’avant dernier. Ca fait déjà quatre mois que je suis là, ce qui signifie aussi que je rentre dans exactement un mois. C’est difficile de dire si c’est long ou court en fait, ça dépend des jours et des évènements qui se passent ici ou à l’autre bout du monde, chez vous… Mais bon je digresse déjà, donc bilan de ce dernier mois :

-          Bilan « relations humaines » tout d’abord : ce que je retiendrais de ces dernières semaines, depuis que Farokh est parti et que je suis la seule volontaire à l’orphelinat, c’est le fait que j’ai vraiment l’impression de faire partie de la « famille ». Mes relations avec les petits comme les grands sont vraiment devenues plus personnelles. Un exemple flagrant est l’évolution des discussions que j’ai avec Sundar, le frère de Krishna qui, en même temps qu’il cherche du boulot sur Kathmandu, donne un coup de main ici. Au début, il ne m’adressait même pas la parole, pas parce qu’il est mal élevé non, mais juste parce qu’ici, ça ne se fait pas pour un homme célibataire de 30 ans de parler à une femme célibataire de 30 ans. Et même si il est déjà fiancé, ou peut être encore plus parce qu’il est fiancé, je sais pas trop^^ Bref, je me suis un peu vexée à l’arrivée du premier Matthieu, parce qu’avec lui Sundar a tout de suite tissé des liens d’amitié assez forts, il l’a accueilli comme un ami et n’arrêtait pas de discuter avec lui, malgré leurs difficultés en anglais respectives. Et ça a recommencé avec Farokh le mois dernier, ils étaient comme cul et chemise au bout d’une semaine, de quoi vraiment me saouler, parce que moi ça fait des mois que je suis là et jamais il ne m’a traité comme ça. Evidemment, on a appris à se connaître, on a discuté un peu, mais ça n’a juste rien à voir avec son comportement avec un volontaire masculin. Pas que je sois jalouse, moi je suis très proche de Niru, et en termes de discussions amicales, j’ai mon compte  :)  Mais bon… Et enfin ces dernières semaines où on s’est retrouvés « seuls », sans volontaire autre que moi, ça a bien évolué. Un midi, on s’est retrouvés seuls avec Sundar tous les deux à déjeuner, et en plus du riz et des légumes qui étaient déjà prêts, il a fait une omelette (un homme qui cuisine au Népal, wow !!), bon je dois avouer que quand je l’ai entendu s’affairer en cuisine, j’ai attendu sagement qu’il finisse et qu’il m’appelle pour manger (girl’s power, sorry ! ). Bref, d’une part déjà, c’était super bon parce que c’est un très bon cuisinier (il cuisine souvent la viande quand on en a, et d’ailleurs ça m’énerve de voir qu’un si bon cuisinier ne cuisine que pour les occasions particulières !), et d’autre part on a vraiment eu une chouette discussion autour de cette omelette ! Depuis, il vient même dans ma chambre pour discuter de temps en temps, on parle de tout et de rien, (il m’a même raconté que sa copine avait mis trois mois à accepter sa demande en mariage  :)  ), il m’a parlé de ses projets, avec elle et pour le boulot. Bref, maintenant on parle de choses superficielles comme de sujets de fond, c’est que, vraiment pour lui, je fais partie de la famille ! Et ça me fait plaisir, parce que notre relation est maintenant bien « ancrée » et que ça compte plus pour moi que les « hugs » qu’il fait aux volontaires masculins quand il les voit^^

Et sinon l’autre chose qui me fait me dire que je fais partie de la famille, c’est les enfants. Qui maintenant prennent comme acquis le fait que je les aide dans à peu près tout et qui viennent me voir dès qu’ils ont un souci. Et même limite plus moi que les autres adultes ici, ils ont plus de facilités à me confier leur souci qu’à la « kommandantur » que représente Laxmi pour eux. C’est un peu dommage, car elle et Krishna font vraiment du bon boulot (je n’ai jamais vu des enfants aussi polis, respectueux et serviables, vraiment au quotidien ils sont adorables), mais elle passe à côté de beaucoup en étant si sévère à mon avis. Bref, je vais essayer de lui en toucher deux mots, mais c’est un sujet un peu sensible à aborder, je veux surtout pas la vexer en lui donnant « la leçon », donc je vais essayer de prendre des pincettes…

-          Bilan matériel ensuite : ça y est, on a fait le check up santé des enfants. Encore un truc à rayer sur ma to-do-list  :)  Un médecin est venu à domicile (oui parce que trimballer 11 enfants chez le médecin, c’est un peu chaud…), il a écouté les poumons, le cœur, regardé le blanc des yeux, fait une prise de sang et a récupéré les « petits pots » pour les analyses d’urine et de selles. Je vous dis pas l’aventure quand on a expliqué aux enfants pour les analyses et la prise de sang. Ils m’ont detesté l’espace d’un moment je crois quand à la question : « Miss, why do we have to do that ?! », j’ai répondu : « Hum, it’s my idea, I wanted to be sure you were perfectly healthy before I leave…”. Bref, ils se sont prêtés au jeu, Lokendra a pleuré pendant la prise de sang, je l’ai pris dans mes bras, mais je crois qu’il me détestait vraiment à ce moment là de lui faire subir tant de souffrances^^ Bref au final ça s’est bien passé, on attend les résultats des analyses et la facture… Apparemment, le médecin (qui travaille aussi pour Médecins sans frontières) nous a dit qu’il ne compterait pas le déplacement à domicile et qu’il nous ferait un « prix ». Ca devrait nous revenir à environ 15 euros/enfant. Donc si vous souhaitez m’aider un petit peu financièrement, vous êtes les bienvenus !

-          Bilan psychologique enfin : comme je vous disais au début de cet article, il ne me reste donc plus qu’un mois, jour pour jour… et j’ai du mal à dire si c’est encore long ou si c’est trop court. Ca dépend des jours et des évènements qui se passent sur votre côté de la Terre. Evidemment quand je reçois la photo du nouveau-né d’une de mes meilleures amies ou bien quand j’ai au téléphone mon filleul de 6 ans qui me demande quand je vais rentrer, je n’ai envie que d’une chose, c’est de prendre le prochain vol et de vous retrouver. Mais en même temps, j’ai pas envie de les quitter, mes filleuls d’ici… Vous allez me dire, c’était sûr que j’allais m’attacher, oui je le sais bien, c’est juste que du coup je suis partagée entre le fait qu’un mois ce soit encore long ou trop court^^ Et puis je sais que psychologiquement le retour ne va pas être facile, alors j’ai déjà géré les choses que je pouvais gérer d’ici : j’ai trouvé un appart à Nancy (enfin plutôt on m’a trouvé un appart, merci les amis  :)  ) et j’ai booké (ou on m’a booké, encore merci les amis et la famille !) à peu près tous mes week-ends d’août pour ne pas tomber dans une déprime post-je reviens-du-népal-après-m’être-occupée-d’orphelins-pendant-5-mois… Bref, j’essaie de me préparer, comme vous pouvez le voir, parce que le hiatus entre nos 2 mondes est tellement immense, qu’il va me falloir bien un mois pour me préparer au retour et un mois pour m’en remettre à l’arrivée. Et puis après il y a aura la reprise du boulot et des situations abracadabrantesques comme on en connait qu’à l’éducation nationale. La question est : vont-ils me faire travailler cette année ? Si oui, dans quelles conditions ? A quel bout de la Lorraine ? Pour faire de la physique ou autre chose ? Est-ce que ce sera au moins un établissement général ? Bref, tant de questions qui me reviennent petit à petit à l’esprit, quand je vous vois tous, mes amis profs, sur facebook ou par mail, souffler un grand coup à l’approche des grandes vacances…

Bon, en attendant de retrouver tout ça, moi j’ai du kérosène à aller acheter (ouais hein, ça fait peur d’aller acheter du kérosène en bidon de 5 litres^^) et des légumes aussi et puis j’ai 11 gamins à aller récupérer à l’école. On va passer deux bonnes heures à faire les devoirs, à faire des multiplications et des divisions, à trouver le PGCD, savoir ce qui est insoluble dans le kérosène, écrire des « essays » sur l’importance d’être patriote, apprendre à lire l’heure et bien d’autres choses encore. Bon et puis une fois les devoirs terminés (parfois ils en ont vraiment beaucoup, leurs profs sont vraiment tarés^^), on va aller faire du vélo (j’ai lâché Purna l’autre jour, le grand frisson !), et puis on va servir le dîner, faire la vaisselle, se brosser les dents et se faire un bisou pour se dire bonne nuit. C’est vraiment simple la vie ici… Pourquoi se poser tant de questions existentielles sur mon retour, franchement ?!

PS : juste une chose encore : comme cadeau de départ, j’ai l’intention d’acheter à tous les enfants des habits bien chauds pour l’hiver (même si c’est pas du tout de saison) car en vidant leurs armoires l’autre jour, je me suis dit que c’était plus que nécessaire… Donc si ça vous dit de participer… Je sais bien que vous êtes probablement en train de préparer vos vacances d’été et que vos finances sont sûrement serrées, mais si ma présence et mon action ici ont du sens pour vous, c’est le moment de m’aider… A bon entendeur… ;)

 

 

 

Et de 3 !

Et voilà, on a déjà dépassé la moitié de mon séjour, ça fait 3 mois bien sonnés que je suis là maintenant. Après un trekking avorté et un troisième et dernier invité français, me revoilà à faire un bilan :

-          Bilan relations humaines tout d’abord : passer plus de 3 semaines avec Buzz m’a confirmé le sentiment que j’avais : si j’avais un frère, je voudrais qu’il soit comme lui. Ni plus, ni moins. La similitude de nos situations familiales fait qu’on a beaucoup de choses en commun et j’ai vraiment apprécié les moments passés avec lui, même si on a eu une poisse terrible. Le retour anticipé à l’orphelinat a aussi été un plaisir. J’avais un grand besoin 3 semaines plus tôt de me changer les idées, de prendre l’air et je l’ai fait, pas dans les conditions que j’espérais, mais quand même. Après le retour précipité à Kathmandu, le passage à l’hôpital (assez marrant au début cela dit, ils ont un ECG portable avec des ventouses qu’on dirait sorti tout droit des années 70  ;) ) et les problèmes d’assurance de Buzz, je n’avais envie que d’une chose, c’était de rentrer « à la maison ». Et ma maison, c’est ici, à l’orphelinat, avec les enfants. Pour moins de 2 mois maintenant. Je l’ai vraiment ressenti comme ça en rentrant. Retrouver les habitudes : le biscuit du matin, la préparation du petit-déj, des repas, la vaisselle, les jeux, le goodnight kiss, et toutes les autres petites choses qui font que ici ça ne sera jamais pareil qu’ailleurs. Et même si c’est fun d’avoir des activités à l’extérieur, c’est encore ici que je me sens le mieux. Le retour a été assez intense avec les enfants car on a passé une semaine 24h/24 ensemble du fait des grèves qui les empêchaient d’aller à l’école. Au bout de cette semaine, la situation politique est revenue à la « normale » (c’est-à-dire qu’ils n’ont toujours pas de constitution et qu’ils ont juste reporté le problème de 6 mois…) et on était tout contents (enfants comme adultes) de retrouver le chemin de l’école. Sauf qu’en arrivant à l’école… on a trouvé porte close. Des examens devant se dérouler pendant les grèves ont été décalés après les grèves et l’école des enfants, centre d’examen, a été fermée aux écoliers pendant encore 5 jours ! Donc en tout, les enfants sont restés près de 2 semaines à la maison. Et deux semaines, avec 11 enfants, enfermés dans une maison, si grande soit-elle… c’est long. Bien-sûr, on a trouvé toutes sortes d’activité à leur faire faire : du dessin, des poèmes à réciter, des «telling story competition » en anglais (à ma demande, parce que jusque là, ils le faisaient en népali, mais j’y comprenais rien, je les ai donc mis au défi de faire de même en anglais et ils s’en sont plutôt bien sortis ! ), des puzzles, du sport, des jeux de toutes sortes. Et puis comme je vous disais, la télé les a bien occupés aussi. Sauf que parfois, j’arrivais en trombe dans le salon, à la surprise des petits comme des grands (qui sont aussi des fans des Bollywood de m**), excédée quand au bout de 2h, ils n’avaient toujours pas bougé d’un poil et qu’ils avaient toujours leurs têtes de poisson, la bouche ouverte devant l’écran qui leur déversait toutes sortes de clichés et de préjugés indiens insupportables. « You don’t like TV, Miss ?! » No, I don’t, I really don’t ! Look at you’re faces, your brain will soften for sure ! Come on, we will do something outside ! Alors on les a emmenés voir les temples que je visite au cours de mes joggings matinaux, ils ont été étonnés de voir qu’à quelques centaines de mètres de leur école pouvaient se trouver de si beaux monuments. Et puis, le top du top, ça a été la sortie pic-nique qu’on a organisé avec Farokh, le volontaire irano-américain qui est ici pour deux semaines. On a demandé à Krishna de nous trouver un parc où emmener les enfants, on a acheté des jus de fruits, des biscuits et toutes sortes de denrées pour faire des sandwichs, on a emmené de quoi jouer pour l’après-midi et on est donc parti pour le parc du jardin botanique national. A 45 min en bus de l’orphelinat, ça a été une vraie bouffée d’oxygène pour tout le monde. Les enfants sont pour une fois sortis de la ville, ils ont pu se balader et courir dans la nature, manger des hots dogs et autres sandwichs, et s’amuser à l’air libre pendant toute une après-midi. J’ai eu l’impression qu’on était en camp de vacances, c’était vraiment super chouette. Et puis il y a eu cette phrase spontanée de Sushma qui, au retour de leur petite balade dans le parc, alors que j’avais préparé à nouveau quelques sandwichs pour eux, s’est exclamée : « You really are like a mummy for us ! ». Sourire jusqu’aux oreilles. ( Pour moi ou pour elle, à vous de deviner ;) ). Et puis, voyant Laxmi assise à 2m de moi, se ravise et dit : « No, no, no, Aunti is like a mummy, and you are like an Aunti for us !” Ok, ça me va aussi, mais je me demande encore : se serait-elle ravisée si Laxmi n’avait pas été dans les parages ? En tout cas, c’est vraiment comme ça que je le ressens maintenant, je ne me sens pas comme une simple bénévole de passage, je les connais maintenant tous très bien, chacun avec son caractère, et même je les engueule si c’est nécessaire, mais je suis aussi toujours là pour eux si ils ont besoin. Et ils le savent. Pour moi ils sont devenus bien plus que « les orphelins du Népal ». Ils sont devenus chacun et chacune un de mes neveux ou une de mes nièces, ou plutôt mes filleuls, oui c’est ça, ce sont tous mes filleuls et je suis leur marraine, et Dieu sait que j’adore ça. Je crois que c’est ma vocation en fait, d’être marraine, d’ailleurs pourquoi on appelle un parrainage un Parrainage et pas un Marrainage d’abord ?!  ;)

-          Bilan matériel ensuite : ça y est, on a le quatrième banc !! Youhou, ça ne faisait que 3 mois qu’on l’avait commandé ! Les enfants peuvent enfin travailler à leur aise, mais figurez-vous que certains d’entre eux ont encore l’audace de s’asseoir à califourchon au centre des tables (qu’on a disposé en carré). « Non mais, are you kidding me ?! ». Ah les habitudes ! C’est pareil pour le tuyau qu’on avait fait installé quand je suis arrivée, maintenant qu’on a assez d’eau et de bonne qualité dans le puits n°2 qui possède une pompe, les enfants peuvent faire leur vaisselle tout seul en ouvrant simplement le robinet, mais ils font quoi à la place à votre avis?! Ils ouvrent le robinet pour remplir un seau et prennent un petit pot pour se verser de l’eau… non mais on marche sur la tête !! Comptez sur moi pour leur prouver par a+b que c’est complètement ridicule ;) Sinon la deuxième bonne nouvelle après le banc, c’est un des livres d’école de Sushma et Rubina qu’on a réussi à trouver dans une librairie. A chaque fois que je passe devant une librairie, je demande au cas où, ça a marché pour un livre ! Espérons qu’on trouvera le deuxième bientôt… Ca ne fait que deux mois que les enfants ont repris l’école…

Coté finances, pour l’instant y’a pas trop de grosses dépenses à venir, si ce n’est le loyer et les courses, et je devrais m’en sortir sans trop de dégâts. Mais j’ai comme projet de faire un check up santé complet de tous les enfants avant de repartir. Donc si jamais vous vous sentez de m’aider un petit peu, vous êtes les bienvenus. On a déjà comme je vous l’ai dit, augmenté la part de légumes dans l’assiette, on y rajoute aussi du tofu et toutes les protéines et vitamines qu’on peut trouver. J’achète plus de fruits aussi. Au lieu de boire du thé au retour de l’école maintenant, on boit du Tang, c’est-à-dire du jus de fruit en poudre qu’on dilue dans l’eau. Evidemment ça serait mieux de manger des fruits frais, mais c’est hors budget au quotidien. On est encore loin des « 5 fruits et légumes par jour », et je ne vous parle même pas des laitages et autres protéines, mais bon, on s’en approche petit à petit. Que restera-t-il de tout cela quand je repartirai ? Je ne me fais aucun doute là-dessus, les finances seront à nouveau beaucoup plus serrées, y’aura moins d’argent pour toutes ces considérations d’occidentale-qui-est-obsédée-par-le-régime-alimentaire-des-enfants. Mais j’ose espérer qu’il en restera quand même une habitude de préparer plus de légumes, au moins ça…

-          Bilan psychologique enfin : ben ça va plutôt bien, comme je vous disais, je me sens comme à la maison ici, je m’occupe des enfants comme si c’était les miens et je n’hésite pas à manifester mon mécontentement. Parfois je prends des pincettes, parfois je prends sur moi. Je ne me fais aucune illusion, je ne vais pas changer leurs habitudes et je n’ai pas l’intention de m’installer ici ad vitam eternam. Je sais que je vais revenir par contre, c’est une certitude. Ne serait-ce que pour faire ce pu*** de trekking qui m’a échappé de peu. Je n’ai pas dit mon dernier mot. Et pour ces enfants non plus, je suis loin de l’avoir dit. J’ai bien l’intention de les voir grandir, de suivre chacun de leur pas et si pour ça il faut que je revienne régulièrement ici, je le ferai sans problème. Parce qu’à distance, les liens se distendent vite, je le sais bien. Je n’ai pas envie de les oublier et je n’ai pas non plus envie qu’ils m’oublient. Je crois que dans un certain sens, je fais déjà partie de leur vie, parce qu’ils savent que de loin ou de près, je veille sur eux. Krishna et Laxmi, que je respecte profondément, me fatiguent parfois dans leur comportement, mais je me dis que ça doit être pareil de leur côté. Quand on est trop d’adultes à gérer, y’a forcément des tensions. Et puis y’a les différences culturelles aussi, mais pour ça j’ai trouvé un livre très bien que Niru (la volontaire de 23 ans qui aide ici) m’a prêté, il explique d’un point de vue népali la culture occidentale. C’est à la fois édifiant et très marrant. Je me suis reconnue dans toutes les descriptions du premier chapitre, et je comprends un peu mieux en quoi mon comportement de femme indépendante, qui gagne sa vie et qui peut décider par elle-même comment dépenser son argent, peut perturber Laxmi et Krishna. Bon et puis j’ai mon caractère aussi, je le sais bien, si je reste quelques mois de plus ici, je vais finir inévitablement par imposer ma vision des choses à tout le monde, et pour les enfants ça n’est pas forcément une bonne solution, un comportement occidental pour des enfants népalais qui resteront vivre au Népal, ce ne peut pas être la bonne solution. Faire évoluer les mentalités, c’est déjà un grand pas en avant. Redonner à l’enfant sa place d’enfant en réduisant ses tâches ménagères, l’aider et non pas le réprimander quand il n’arrive pas à faire quelque chose, lui donner confiance en lui et créer un rapport de confiance au quotidien. Vous me direz, ils ne font pas ça les adultes de l’orphelinat ? Je dirais : oui et non. Ils les éduquent très bien, ça ne fait aucun doute, quand Krishna et Laxmi sont là, y’a pas un bruit, ça file droit, mais ça me fait plus penser à l’armée qu’à autre chose^^ Ils leur offrent une bonne éducation, une bonne hygiène de vie et clairement ces enfants-là sont bien mieux ici qu’à peu près n’importe où ailleurs au Népal, mais tout ça manque un peu de tendresse et de chiffoutage tout de même (t’as compris Michèle, ce que ça voulait dire chiffouter maintenant ?!)

Bon et puis sinon pour finir ce long article de bilan, il faut quand même que je vous avoue une chose :  la France me manque. Un peu. J’aurai bien envie de rentrer une semaine « en vacances » en France et puis de revenir ici. Quand Buzz est parti, je serai bien rentrée avec lui, pour revoir ma famille, jouer avec mes petits neveux, manger des patates rôties, du fromage avec du pain (une baguette SVP !!!), du saucisson et boire un verre de vin rouge  ;)  Prendre un apéro avec les amis, se raconter nos vies et celles des autres. Rendre visite à mes amies qui sont ou qui vont devenir jeunes mamans dans les jours à venir. Aller prendre le thé chez Paulette et l’écouter me raconter sa jeunesse ou bien critiquer les politiques de tous bords avec elle  :)

Oui vous me manquez tous, mais je sais aussi que les enfants d’ici vont terriblement me manquer quand je vais repartir. A chacun des départs de mes amis français, j’ai eu la gorge terriblement serrée à l’idée de mon propre départ, pour moi c’est juste inconcevable de leur dire au revoir. Il va falloir que je parte comme une voleuse pour ne pas m’effondrer en larmes devant eux. Mais je ne peux pas partir comme une voleuse, je le sais. Donc je vais commencer à me préparer psychologiquement à partir, à leur dire au revoir sans verser toutes les larmes de mon corps. C’est pas gagné, je vous assure. Donc en attendant, j’ai bien l’intention de profiter d’eux, et cela tous les jours jusqu’à mon départ…

 

Second bilan

Hé oui, c’est déjà l’heure du deuxième bilan, ça fait déjà plus de 2 mois que je suis là. Le premier mois est passé très vite, le second encore plus.

-    Bilan « relations humaines » tout d’abord : accueillir Matthieu et Chrystèle a vraiment été une expérience nouvelle pour moi ici. Les attendre à l’aéroport, leur présenter les enfants, leur expliquer le fonctionnement et les habitudes de la maison, comme si j’étais ici chez moi… enfin pas tout à fait,  puisque ce n’est pas moi qui ai défini les rythmes et les règles de vie ici. Leur faire visiter Kathmandu et les environs aussi m’a vraiment réconcilié avec cette capitale polluée et surpeuplée, parce que mine de rien, elle ne comporte pas moins de 7 lieux classés au patrimoine mondial de l’Unesco… J’ai retrouvé l’ambiance indescriptible de mes temples bouddhistes préférés et les petites ruelles gorgées de trésors cachés… Je pense que je pourrais bientôt me reconvertir en guide touristique pour français, je connais maintenant plutôt bien les lieux !
A l’orphelinat, pendant la période où Matthieu était là, je lui ai laissé ma chambre et j’ai dormi avec les filles, et évidemment ça nous a beaucoup rapproché. Quand Chrys est arrivée, on a récupéré ma chambre et on a passé des soirées entières à se raconter nos vies, mais aussi à commenter la vie ici. Ses réactions aux différences de culture, de rythme de vie, les mêmes que les miennes la première fois que j’étais venue ici. Ca m’a rassuré d’une part, parce que je me suis dit que je n’étais pas la seule à être choquée par certains comportements (machistes par exemple), et puis d’autre part, ça m’a fait sourire, parce que  je me rends compte que maintenant je m’énerve moins. Je crois que je me suis un peu habituée en fait ou bien que j’ai développé un sens de l’abnégation que je ne me connaissais pas encore^^ Elle m’a aussi gentiment fait remarquer que si je continuais à vivre comme ça au quotidien, mon cerveau allait se ramollir^^ Elle n’a pas tort entre nous, c’est vrai que par rapport à ma vie en France, je n’ai pas ici de stimulation intellectuelle particulière, il faut que je m’achète un bouquin de physique en anglais je crois ;) Pour le vocabulaire utilisé ici à l’orphelinat, je suis maintenant totalement bilingue et ça ne me demande pas de réflexion particulière. Je n’en tire aucune fierté : le simple fait d’avoir maté des centaines d’heures de séries en VO et d’être immergé ici suffirait à n’importe qui pour se débrouiller.
Son arrivée m’a permis aussi de me rapprocher encore plus des garçons, comme elle vous l’a expliqué. Le « Goodnight kiss » est maintenant habituel alors qu’avant la pudeur des garçons m’empêchait de trop les toucher ou les embrasser. Mais ça aussi c’est culturel, on ne se fait pas de bisou ici, et surtout pas entre filles et garçons (et moi apparemment je fais encore trop jeune pour eux, alors que Chrys, elle, fait déjà plus « maman », le fait qu’elle mette des décolletés par ex ne choque personne alors que moi, les enfants, les filles surtout, me le font remarquer tout de suite^^). Bref, il n’y a pas que son (grand ;) ) âge qui ait joué, il y a évidemment aussi sa personnalité, ceux qui la connaissent comprendront. Et ceux qui ne la connaissent pas auront compris qu’elle a un feeling particulier avec les enfants, les ados et à peu près tout ce qui touche l’éducation (nationale^^). Bref, encore une fois, elle m’a beaucoup apporté et pour cela, je la remercie mille fois d’être venue passer ses vacances ici. Bon comme d’hab aussi, elle m’a retourné le cerveau avec ses questions et ses remarques toujours particulièrement  pertinentes, mais bon, on a les amis qui nous ressemblent, je ne le dirai jamais assez !

-    Bilan matériel ensuite : On a acheté les uniformes, les cahiers, les livres, on a fait réparer les sacs. On a augmenté aussi la proportion de légumes dans l’assiette. Apparemment, ça ne dérange pas particulièrement les enfants de manger moins de riz, moi non plus ;) La nouvelle table de travail devrait arriver incessamment sous peu, ce qui veut dire à peu près « on sait pas quand » au Népal. Mais là aussi, j’ai développé une patience à toute épreuve. On a quand même attendu plus d’un mois pour récupérer la table de la cuisine qu’on a fait réparer parce qu’elle était toute branlante, et puis on a aussi attendu un mois que le plombier passe pour nous réparer la pompe électrique du puits numéro 2. Ah oui et puis certains enfants n’ont encore pas tous leurs livres, mais c’est monnaie courante ici à la rentrée apparemment. Du coup, Rubina et Sushma ne peuvent pas faire tous leurs devoirs… Ca me rend dingue ! Bref, wait and see, c’est la philosophie d’ici… parce qu’ils ne peuvent pas vraiment faire autrement en fait ! Bon sinon, du côté des finances, l’argent des calendriers a été presque totalement utilisé, mais il faut croire que j’ai un bon ange gardien, j’ai eu des virements ces derniers jours sur mon compte que je n’attendais pas. Donc merci mille fois à mes bienfaiteurs ;) Oh, et désolée de ne pas toujours répondre à tous vos mails, j’ai eu à peine le temps de les lire ces derniers jours, mais pas du tout d’y répondre… Je me rattraperai après le trek, promis !

-    Bilan psychologique enfin : bon ben, mis à part certaines choses qui m’énervent, je vais toujours plutôt bien :) Et tant que je m’énerve, je me dis que ça va en fait. Je garde toujours à l’esprit le « pourquoi » je suis venue ici pour ces 5 mois, et quand je vois les enfants rire, s’épanouir et finir parmi les premiers de la classe, ça me conforte dans mon choix. Je suis heureuse de faire partie ne serait-ce que quelques mois de leur vie quotidienne et si je peux les aider un peu, en les soulageant dans leurs tâches (dont Chrys vous a parlé, à ce propos Alain, oui je pense que Chrys va pouvoir répondre à ta demande, je lui avais demandé d’écrire un article à tête reposée une fois rentrée chez elle), en les aidant dans leurs devoirs, en leur achetant des vêtements et une nourriture un peu plus riche, en jouant avec eux, en les faisant sortir un peu de leur quotidien, je me dis que c’est la goutte d’eau qui fait la différence pour moi et pour eux.

Bon, et puis aujourd’hui y’a mon deuxième Mathieu qui arrive, et avec lui, on a prévu de gravir l’Everest ! Bon ok, on va pas le gravir, on va juste le regarder depuis le camp de base, mais on va quand même grimper jusqu’à 5500m… J’ai les chaussures de rando qui me démangent là :) Je vais revoir les montagnes que j’ai pu un peu découvrir lors de ma première sortie il y a un mois de ça et j’ai trop hâte. En plus, physiquement, je me sens vraiment bien, le jogging quasi quotidien à 5h et demi du mat’ dont l’itinéraire passe par les plus beaux temples de la ville me fait un bien fou, pour le corps et pour l’esprit. Je suis fin prête à partir, mon sac est fait, y’a plus qu’à récupérer MatBuz à l’aéroport et à embarquer pour Lukla !
Mais pour cela, il va falloir quitter les petits… J’ai laissé à Rubina assez de biscuits pour le thé du matin pour toute la durée de mon trek, c’est-à-dire 18 jours. J’ai eu droit à des mines renfrognées quand je leur ai dit combien de temps je partais. Mais je reste encore 2 mois après mes p’tits loulous ! Et j’ai vraiment besoin de prendre l’air là, sinon je vais exploser, comme disait Chrys, je ne partage pas tout du fonctionnement d’ici, aux différences culturelles énormes s’ajoute aussi le fait de cohabiter avec 15 personnes au quotidien et de gérer les caractères de chacun, j’en parlerai plus dans un autre article si ça vous intéresse. Jusqu’ici ça s’est très bien passé, mon objectif n’est pas de changer toutes leurs habitudes mais si je peux un petit peu faire évoluer les mentalités à mon niveau, ça sera déjà ça de pris. Je reviendrai donc dans 18 jours gonflée à bloc, super heureuse de les retrouver et de profiter des enfants  encore 2 mois complets… oh purée plus que 2 mois en fait… Que le temps passe vite…

Premier bilan

1er mois écoulé… à la vitesse de la lumière ! A peine le temps de me dire que j’étais arrivée, et me voilà déjà à faire un premier bilan.

 

•    Bilan « relations humaines » tout d’abord : je craignais au bout de quelques semaines de me sentir seule, étrangère, nostalgique. Et en fait pas du tout. Cela grâce à l’accueil, le sourire et … l’internet.

L’accueil de cette famille (re)composée, qui vous donne l’impression d’en faire partie à la minute où vous entrez dans la maison. Elle vous happe et vous entraîne dans ses rythmes, ses joies et ses traditions. A tel point que parfois vous vous demandez comment vous avez pu vivre autrement avant. Pourquoi vous aviez tant de besoins quand vous étiez chez vous, alors qu’ici vous ne vivez avec presque rien. Vous avez des problèmes bien plus concrets aussi : économiser l’eau, jongler avec les coupures d’électricité, faire les courses pour 17… Et pourtant ça ne vous pèse pas plus que ça, voire même, vous en redemandez. L’autre jour, Laxmi et Krishna étant partis rendre visite à leur famille, on s’est retrouvées seules avec Niru à s’occuper des enfants pendant 24h. On a joué beaucoup, Niru a fait réviser les enfants et moi, avec l’aide de Rubina, j’ai préparé les repas. On était « In charge »… et j’ai adoré ça. A tel point que quand ils sont revenus, je me suis dit qu’ils auraient pu rester un peu plus longtemps…

Le sourire des gens sur le chemin de l’école aussi vous donne l’impression de faire « partie des meubles ». Un Namaste par ci, un hochement de tête par là, on vous reconnaît et même le vendeur de la petite boutique où vous achetez les biscuits du petit-déj ne vous demande plus ce que vous voulez, il vous donne directement vos préférés, à la noix de coco. Le marchand de légumes vous donne toujours une ou deux patates en plus et puis si vous n’avez pas assez pour payer ce jour-là, il vous fait crédit, pas de souci.

Et quand vous avez besoin de vous isoler un peu et d’avoir des news de France, il vous suffit d’allumer votre pc et avec un peu de chance vous captez peut être un réseau wifi, grâle qui vous permettra de lire et d’envoyer quelques nouvelles. Vous êtes à des milliers de kilomètres de votre pays, et pourtant qu’à un clic de vos parents, sœurs et amis. C’est vraiment génial l’internet.

 
•    Bilan « matériel » ensuite : pour l’instant, vous vivez sur l’argent des calendriers. Vous avez pu rembourser les dettes du loyer, faire deux fois les « grosses » courses, et améliorer le quotidien un peu chaque jour en achetant des fruits, de la viande et d’autres denrées. Vous savez cependant que bientôt vous aurez vidé votre réserve d’argent, surtout après avoir acheté les nouveaux uniformes et les fournitures pour la nouvelle année scolaire. Plutôt que de vous rendre malade pour la suite, vous faites comme Krishna, vous continuez à avoir la foi, et vous vous dites que si le pire peut nous arriver, le meilleur aussi. C’est tout un état d’esprit.
Et comme dirait Rubina :  « We never know what future will be, right ? »

 
•    Bilan « psychologique » enfin : vous ne vous sentez pas trop mal, et même plutôt bien en fait. Vous faites ce pourquoi vous êtes venue, mais chaque jour malgré tout se pose la question de votre utilité ici… Suis-je vraiment efficace ? Est-ce que je réponds réellement aux besoins des enfants ? Ne serais-je pas plus utile ailleurs ? Toujours cette remise en question et cette envie d’en faire plus, mieux, encore. Serait-ce de l’orgueil ? Alors je me replonge humblement dans mes tâches quotidiennes et j’essaie au jour le jour d’aider au mieux, les enfants bien-sûr en prenant soin d’eux comme si c’était les miens, mais aussi les adultes qui ont eu le cran de se mettre en difficulté financière pour ouvrir cet orphelinat. Respect.

 

Voilà, j’ai à peu près fait le tour, vous rajoutez à ça que le riz ne me dégoute même pas, que j’ai sûrement perdu quelques kilos superflus mais que physiquement je me sens bien, que je reçois bientôt ma première visite française qui va me permettre de prendre un peu de recul sur tout ça, et surtout que je vais voir et gravir dans quelques jours mes premières « vraies » montagnes du Népal. L’Annapurna… rien que le nom me fait rêver. J’ai hâte et pourtant je sais que je vais rater des trucs ici, les résultats des examens des enfants par exemple. Les dates ne sont tombées qu’hier, c’est dommage, si j’avais su, on se serait arrangé autrement. Mais bon, c’est pas grave, on fêtera ça à notre retour, avec plein de petits cadeaux de Pokhara pour les enfants !